Identifiez-vous pour ajouter une information temporelle
0:00

La méthode de Schéhérazade ou les pouvoirs de la fiction

2130 vues
Taguer Partager
mardi 26 sep 2017
Rectorat - Directement rattaché au rectorat

La réalité de la littérature (qui, au bout du compte, contient le peu de sagesse qui nous est impartie) est intimement ambiguë, fragmentée, toujours mouvante, et ne prend jamais complètement le parti de personne, si héroïque que paraisse le personnage. Dans notre connaissance littéraire du monde, nous sentons intuitivement que même Dieu n’est pas inattaquable ; beaucoup moins encore que nos chers Andromaque, Parsifal, Alice, Candide, Bartleby, Gregor Samsa, Alonso Quijano.

Nous le savons : c’est souvent un personnage de fiction qui fait découvrir à ses lecteurs la vérité des mots avec lesquels Cervantès loue l’auteur arabe supposé de son histoire : « Le livre dépeint des pensées, met au jour des chimères, répond à des questions muettes, clarifie des doutes, résout des disputes et finalement révèle les atomes mêmes du désir le plus mû par la curiosité ». En temps de crise, qu’elle soit réelle ou fictive, pratiquement tout livre, tout vrai livre, peut également réaliser tout cela pour nous. C’est en cela que doit résider notre espoir.

Alberto Manguel est né en Argentine en 1948. Il a grandi en Israël (où son père était ambassadeur d’Argentine), puis dans son pays natal où, dans sa jeunesse, il a fait la lecture à Jorge Luis Borges devenu aveugle. Il a résidé par la suite dans divers pays, notamment une vingtaine d’années à Toronto (Ontario, Canada). Il est devenu citoyen canadien en 1985. En décembre 2015, il a été nommé directeur de la Bibliothèque nationale d’Argentine à Buenos Aires.

Journaliste (presse, radio, télévision), il a publié de nombreuses anthologies, des romans, des traductions et des essais. De son œuvre internationalement reconnue, on retiendra notamment Chez Borges (2005), Stevenson sous les palmiers (2005), La bibliothèque, la nuit (2006), La fiancée de Frankenstein (2008). Il est le premier écrivain à avoir donné son nom à un CDI d’établissement scolaire français de son vivant : le lycée Victor Hugo de Poitiers possède depuis quelques années le CDI Alberto Manguel.

Il est commandeur de l’ordre des arts et des lettres (France) et docteur honoris causa des universités de Liège (Belgique), Cambridge Anglia Ruskin (Angleterre), York et Ottawa (Canada). Il a obtenu (entre autres) le prix Médicis essai (1998), le prix Germán Sánchez Ruipérez (2002) et le prix Roger-Caillois (2004). En 2017, il a été désigné lauréat du prestigieux Prix Formentor de las Letras pour l’ensemble de son œuvre, considérée comme « l’une des investigations les plus lucides de l’histoire organique de la bibliothèque universelle ».